#Généathème : La Première Guerre Mondiale… et mes ancêtres picards !

Mes ancêtres résident dans les villages de Athies/s/Laon, Gizy, Samoussy situés à quelques lieues de Laon.
Parmi eux, pas de soldats engagés pour combattre, les hommes sont trop âgés ou trop jeunes.

Laissez-moi vous conter leur guerre ; pour eux aussi, ça devait être : » La der des ders »… !

L’occupation allemande à Laon est l’une des plus dures que les populations civiles ont eu à subir. Elle va durer quatre longues années et éprouver les personnes :

Le territoire occupé est coupé du reste de la France et privé de toute information… Toute correspondance avec le pays est totalement interdite. La population ne connaît pas le déroulement des opérations militaires et ignore le sort des soldats… Dans ce contexte, les allemands procèdent à la germanisation du territoire…

Au moment de la mobilisation, à Laon :

« Le 1er août 1914, la ville est bouleversée, c’est une bien triste journée, la mobilisation. Le 25 août, les magasins ferment. L’exode de la population commence… Le 27, le dernier numéro du journal de l’Aisne paraît…
Le 30 août, les dernières administrations quittent la ville….
Le lendemain 31, c’est le dernier train qui quitte l’importante gare où se joignent Compagnie du Nord et Compagnie de l’Est.
Le mercredi 2 septembre, le Sénateur-Maire Mr G.Ermant… voit l’occupant entrer dans l’hôtel de ville… »

« Dès le lendemain, des officiers supérieurs en armes avec des soldats baïonnettes au canon envahissent le cabinet du maire et déposent une énorme réquisition : 70 000 kg de pain ou de biscuit, 20 000 kg de lard ou de jambon, 10 000 kg de riz ou de semoule, 20 000 kg de café torréfié ou de chocolat, 2 000 kg de sel, 70 000 kg d’avoine, 20 000 kg de cigares ou de bon tabac à livrer le lendemain 4 septembre à midi, sous peine d’exécution militaire.
Le maire répondit qu’il lui était impossible de remplir cette réquisition. pourquoi, ajouta t-il, tout cet appareil militaire vis à vis d’un homme désarmé ? Si vous me faites fusiller, vous me conduirez à l’immortalité…
Cette première demande de réquisition fut la seule qui n’eut pas de suite. »

La ville est transformée par l’ennemi :
L’occupant modifie le nom des rues, les magasins,  impose l’heure allemande (une heure de plus que l’heure française), accroche des portraits de l’Empereur, organise des fêtes allemandes.

Les maisons portent une pancarte obligatoire où sont mentionnées diverses indications : nom de la rue… nom, prénoms des occupants, sexe, âge, nombre de pièces des locaux et nombre de lits…

Il est interdit de déménager sans autorisation préalable…

Pour remplacer la presse interdite, les allemands publient leur propre journal : « Journal de guerre »…

Chaque jour voit son lot d’interdictions communiquées par voie d’affichage.
Tout déplacement de commune à commune est limité par un laisser-passer.
La circulation des personnes est étroitement surveillée
Les allemands réquisitionnent les produits alimentaires et les objets, astreignent la municipalité à d’importantes contributions financières et saisissent dans les industries matières premières et machines-outils qui sont envoyées en Allemagne…

La population est soumise au travail forcé et doit participer à l’effort de guerre allemand : plusieurs centaines de jeunes sont emmenés pour travailler sur les voies ferrées ou pour d’autres travaux pénibles…

La peur et la mort rôde :
Laon est située à vol d’oiseau à 15 km du front qui passe sur le « Chemin des Dames » du 15 septembre 1914 au 27 mars 1918. 

Au cours des 1502 jours d’occupation, la ville a connu des heures tragiques : des civils, parmi eux des femmes et des enfants, sont touchés par les bombardements.

L’une des choses qui va choquer l’occupé est l’accumulation des vexations :
-Le Général Commandant ordonne que la population masculine salue, en se découvrant, tous les officiers.
-Il est strictement interdit à la population de causer avec les prisonniers de guerre français, de leur faire signe, de les saluer ou de leur jeter des fleurs… Sous peine d’amende, d’emprisonnement voire de déportation.
Pour remplacer le chanvre, les allemands aspirent à récolter le plus possible d’orties (les feuilles sont comestibles, leurs tiges servent à fabriquer la toile des sacs de sable des tranchées). Ils embauchent pour rien les enfants qui sont surveillés, afin que le travail soit productif,  par leurs maîtres d’école…
Idem pour l’arrachage des pommes de terre…

Le ravitaillement alimentaire est difficile pour la population, d’autant que l’occupant réquisitionne presque tout. Le pain est rationné et n’est vendu que le matin…

Après toutes ces exactions, ces privations et ces vexations, l’heure de la libération sonne enfin, le 13 octobre 1918 :

Les troupes de la Dixième armée sont entrées, ce matin, dans Laon où six mille cinq cents civiles ont été délivrés…

Mais, lors de leur retraite, les allemands ont aménagé des traquenards pour retarder l’avancée des troupes françaises :

Ainsi le 16 octobre, des braves de la 3è Cie du 30è R.I se trouvent près de la « Maison Bleue » à Athies s/Laon. Les soldats sont affairés. L’un deux pousse la porte cochère et soudain, c’est le drame ! Une brouette a été dissimulée derrière cette porte ; trois mines sont agencées ; l’explosion se produit et les 48 soldats sont tués, déchiquetés…

                                                  ==============

Enfin, le 11 novembre 1918 près de la Flamengrie (Aisne), le sergent Sellier sonne  l’Armistice . Les combats viennent de se terminer ! Et ainsi s’achève l’horreur de cette terrible guerre.

 
 
 
 
 
 
 



  

Sources  : extraits de l’occupation de 1914-1918 à Laon – Pierre Lefèvre 
              Images : Gallica -BNF : Laon : un coin démoli -(photographie de presse) Agence Meurisse – 1918 
                           Wikipédia : Le bleuet de France   





12 – GénéA à Z – lettre K

K comme Konjetsky :

Signature d’Anna sur l’acte de
mariage de sa fille Louise x Jean-Baptiste
DUVERGET le 26 Juin 1827
A.D LAON 5MI0094

Parmi nos ancêtres, nous avons nos « préférés », Anna & Jean-François Wallon font partie de ceux-là.  J’avoue avoir passé de longues heures à enquêter sur leur parcours ; je les ai poursuivis mais pas complètement attrapés.

Anna Joséphine Konjetsky est une prussienne silésienne.
Elle est née un 29 ? 1785 (les archives ne précisent pas le mois) à Schweidnitz, aujourd’hui Świdnica en Pologne.
Świdnica est une ville dans la *voïvodie de Basse-Silésie dans le sud-ouest de la Pologne.

Ses parents sont Joseph & Marie-Thérèse BOCHMIN.

En rencontrant Jean-François WALLON, Conscrit en l’An 13, imagine t-elle que sa vie sera bouleversée.

Le 5 mai 1809, elle met au monde une fille : Louise Thérèse

Elle épouse Jean-François le 6 mai 1810 à Schweidnitz.

En suivant son mari, elle quitte son pays et sa famille.

Elle l’accompagne de camps en champs de bataille.

Pendant l’épopée napoléonienne, elle mettra au monde deux garçons, un en Westphalie, le second en Bretagne.

Elle traverse une partie de l’Europe, suit Jean-François à Brest, en Bretagne. Puis ils s’installent à Athies-sous-Laon dans l’Aisne après 1814 où elle met au monde trois autres garçons, l’un meurt à 5 cinq ans.

Elle est manouvrière.

Elle s’éteint le 10 avril 1864, à 78 ans :

Comment a t-elle ressenti tous ces bouleversements : la guerre, l’exil, la perte d’enfant… ?

Je l’ignore, mais j’imagine qu’il lui a fallu un extraordinaire courage et beaucoup d’amour pour Jean-François !

*voïvodie : division administrative en Pologne

Le Hurrah d’Athies-sous-Laon

 

Au moment où Jean-François Wallon obtint son congé absolu à Brest ; son village fut le témoin de faits historiques et douloureux pour ses habitants.

En 1814, l’Empereur Napoléon 1er fit face à la sixième coalition.
La retraite de Russie avait laissé une armée amputée. C’est donc avec beaucoup de nouvelles recrues, qu’il s’opposa à l’attaque des alliés.

Napoléon avait battu à Craonne avec ses 22000 soldats, les 22500 hommes du °feld-maréchal Blücher, l’ennemi de toujours, commandant en chef des armées prussiennes et russes.

Blücher, dans sa retraite, choisit le plateau de Laon comme position défensive. En effet, il domine de 25 mètres toute la plaine.
Blücher pouvait, depuis les terrasses de la cathédrale, observer les mouvements des troupes.

Napoléon, désirant prendre au piège Blücher, décida d’un mouvement de tenaille autour de Laon.
La branche droite de cette tenaille était confiée au °°Maréchal Marmont.
Le 9 mars au soir, ce dernier avait réussi une belle percée puisqu’il s’était avancé jusqu’à Athies sur la route de Marle, voie stratégique vers la Belgique en chassant les troupes prussiennes qui brûlèrent entièrement le village lors de leur fuite.

Le 10 au matin, l’Empereur pensait refermer sa tenaille. C’était sans compter, sur le glorieux fait d’armes du *Hurrah d’Athies qui restera dans l’histoire comme la défaite de Napoléon à Laon.

Dans la nuit du 9 au 10 mars, les troupes prussiennes revinrent et mirent en fuite les français qui se replièrent sur Festieux : la cavalerie n’avait jamais été utilisée pour les attaques de nuit ;  les soldats avaient la plus grande difficulté à identifier l’ennemi du compagnon d’arme, on cherchait à tromper en utilisant les cris de ralliement de l’adversaire.
Les flashs produits par les tirs d’armes fournissaient la lumière pour éclairer le champ de bataille, mais elle était aussi source d’éblouissement. Pour le cavalier, la nuit représentait un danger supplémentaire pour sa monture : un trou, un muret… étaient autant de pièges.

Le 5 avril, Marmont trahissait l’Empereur en ouvrant la route de Fontainebleau aux alliés. Paris fut pris. Napoléon abdiqua le 6 avril 1814.
Le 11 avril, le traité de Fontainebleau fixait les frontières du pays à celles de 1792.

L’épopée napoléonienne aura marqué nombre de mes ancêtres : soldats et civils,  leur laissant des stigmates à jamais indélébiles.
* Le hurrah était un terme militaire allemand qui signifiait : combat corps à corps, désordre…
Son but était de surprendre, submerger et anéantir l’adversaire peu importe les moyens utilisés. Il s’opposait à la bataille rangée.
°° Auguste Frédéric Louis Viesse de Marmont : né en 1774 à Chatillon sur seine, mort en 1852 à Venise. Duc de Raguse (1808) Maréchal de France (1809)
° Gebhart-Leberecht Blücher : né en 1772 à Rostock, mort en1819 à Krioblowitz
Prince Von Wahlsatt, Feld-Maréchal.
Source : www.AthiesSouslaon.com

Jean-François Wallon, conscrit en l’An 13

L’Histoire, parfois,  se confond avec la vie des petites gens et les entraîne sur des chemins improbables…
Un de mes ancêtres a suivi, malgré lui, ces chemins qui l’ont mené jusqu’au Royaume de Westphalie, contrée lointaine et éphémère et a transformé sa vie :
Jean-François Wallon (Sosa 40) voit le jour le 18 mai 1784 à Athies-sous-Laon dans l’Aisne.
A 20 ans, il mesure environ 1m57. Il a les yeux gris bleus, les cheveux et les sourcils blonds. Son visage est légèrement marqué par la petite vérole.

La conscription l’enrôle dans le 32e régiment d’infanterie de ligne (3e bataillon, 6e compagnie) le 11 Floréal An 13 (1er mai 1805).

SHD Vincennes 21 YC 282

Il est fusilier, puis tambour.

°Sa solde s’élève à 0,30 centimes (fusilier) ou 0,40 centimes (tambour) par jour qu’il touchera après la bataille et de façon aléatoire.
A l’époque, on exprimait la valeur des centimes en « sous » (1 franc valait 20 sous)

1 – Le 32e RI est constitué par les conscrits de l’Aisne. Basé à Montreuil puis à Etaples, il constitue un des maillons de l’armée d’Angleterre. Finalement, il part vers l’est et traverse le Rhin.
Il fait partie du 6e corps d’armée – Maréchal Ney puis du 1er corps d’armée – Maréchal Bernadotte.
Il participe à diverses campagnes : Autriche en 1805, Prusse en 1806, Pologne en 1807 ; plusieurs batailles dont de celle de Friedland sous le commandement de l’empereur.
Le régiment se couvre de gloire à plusieurs reprises. Ce n’est pas un hasard, si on le nomme : L’Invincible !

Le 1er mai 1808, Jean-François déserte l’armée et est rayé des contrôles pour longue absence… A- t-il déjà rencontré sa future femme, Anna Konjetzky ? Déserte-t-il pour elle ?

1 – A la même période, le 32e RI est appelé en renfort pour la campagne d’Espagne.

Anna est une jeune prussienne d’environ 23 ans, originaire de Silésie.

Elle met au monde leur premier enfant le 5 mai 1809 à Schweidnitz (aujourd’hui : Swidnica – Pologne) : Marie Louise Victoire Thérèse.
Pierre Joseph Hilaire (Sosa 20), leur premier fils naît le 26 mai 1810 à Coennéré – Royaume de Westphalie (aujourd’hui Könnern – Allemagne) .

Jean-François est rattrapé par la maréchaussée. Il intègre le 48e régiment d’infanterie de ligne ( 2e bataillon, 4e compagnie) le 7 juin 1810 après avoir été amnistié.

SHD Vincennes 21 YC 412

2 – Ce régiment fait partie de l’armée d’Allemagne – 3e corps d’armée – Davout, basé au camp de kirtschen en 1809 et au camp de Magdebourg jusqu’en juillet 1811 avant de participer à la campagne de Russie.

Mais avant d’être réincorporé, il épouse Anna, le 6 mai 1810 à Schweidnitz.

Le 5 avril 1812, il est muté au 7e bataillon de Vétérans (6e compagnie) à Brest. Il y arrive le 29 septembre de la même année.

SHD Vincennes GR 19 Yc 127

3 – Les vétérans sont affectés au service des place fortes ou des batteries côtières. Ils touchent une solde et portent l’uniforme militaire. En 1800, on comptait 12 500 hommes, en 1814 : 10 000 hommes.

En Bretagne, Anna accouche de leur 3ème enfant : François, né le 8 décembre 1813.

Jean-François obtient son congé absolu le 21 Novembre 1814.

La famille traverse la France, d’ouest en est, et s’installe à Athies s/Laon.

Trois autres garçons viennent agrandir la fratrie :
-Auguste Désiré, né le 26 Mai 1816, mais il meurt  en 1821 à 5 ans,
-Marcel né le 5 Février 1820,
-Jules Victor Onésime né le 2 avril 1823.

Pour subsister, Jean-François et Anna sont manouvriers/chiffonniers.

Jean-François décède le 26 Juillet 1832 à l’âge de 48 ans.
Anna lui survit 32 années et disparaît à son tour, le 10 avril 1864 à 78 ans.

Pendant une décennie, Jean-François, comme des milliers de soldats,  a arpenté une partie de l’Europe et vécu une épopée difficilement appréhendable : les batailles, les sacrifices, les marches forcées, la misère, la faim….
suivi par Anna et les enfants (comme beaucoup de femmes et d’enfants d’alors, qui ont suivi leurs maris et leurs pères au gré des batailles) : cela est déconcertant, voire inconcevable,  pourtant…

Sources :
 °Les soldats d’empire au quotidien de Jean-Pierre Mir – Editions Archives & culture
1*Historique du 32è régiment d’infanterie de ligne de 1775 à 1890 – SHD Vincennes- 4 M 42
2*Site : darnault-militaires.info/  
3*Histoire et dictionnaire du Consulat et de l’Empire – A.Fierro, A.Palluel-Guillard – J.Tulard

André MARLY, manouvrier et mendiant

*Au début du 19è siècle, la France compte 30 millions d’habitants dont 85% de ruraux.
L’espérance de vie d’un homme est de 38,3 ans contre 39,3 pour une femme.

Ma branche paternelle MARLY est majoritairement constituée de manouvriers…
*Fin 18è – Début 19è siècle, un manouvrier est situé au bas de l’échelle sociale juste avant les vagabonds et les errants.

La vie laborieuse et miséreuse de ces « petites gens » en Picardie me touche au cœur.
Affectivement, il est pénible de constater que certains ont souffert au point de finir leur vie dans le plus grand dénuement :

C’est le cas d’André Marly (Sosa 32).
Il naît le 5 novembre 1765 à Grandlup et décède le 29 mars 1818 à 53 ans.

Il est mendiant et sans domicile fixe.
Il s’éteint, à 5 heures du soir, dans la maison du maire de la commune de Sainte-Preuve.

Plus jeune, il a été manouvrier comme ses parents : François et Marie-Josèphe Lefèvre.

Il épouse Marie Elisabeth Célestine Vraine le 10 messidor an 3 (28 juin 1795) à Grandlup.

Ils ont 6 enfants : Simon Auguste, Joseph Alexandre, Jean Charles Casimir (Sosa 16), Marie Catherine Joséphine, Marie Rose Amélie et Marie Anne Célestine.
Ces deux dernières filles meurent en bas âge.

Mon récit est anecdotique et chaque famille rencontre son lot de heurs & malheurs.
Cependant, mon esprit pragmatique me pousse à penser que lorsqu’on est au bas de l’échelle, on ne peut que monter.
A force de courage, c’est ce que mes ancêtres ont fait de génération en génération.

Je suis fière d’être leur descendante.

Sources :

* CONTEXTE guide chrono-thématique Thierry Sabot (Editions Thisa)

*Voir les articles de Thierry Sabot sur le site de histoire & généalogie : » Les manouvriers » : http://www.histoire-genealogie.com/spip.php?article379
ainsi que : « Les manouvriers au début du 18è siècle, selon Vauban » : http://www.histoire-genealogie.com/spip.php?article287