Dans ma famille, la cuisine est une affaire sérieuse comme je l’ai déjà écrit là !
Parmi les plats familiaux affectionnés se trouve le fameux haricot de mouton, plat ancestral par excellence puisqu’il est attesté depuis le XIVe siècle dans le *Ménagier de Paris.
Mais, ce que nous ignorions, c’est que l’appellation de ce plat est une imposture culinaire !
Comment… On nous aurait abusé ?…
Hélas, oui…
Car à l’origine, point de haricot pour sa réalisation, cette légumineuse n’étant pas encore cultivée chez nous.
Le haricot au sens de ragout (de mouton) était accompagné uniquement de pommes de terre et de navets.
Les fèves se sont invitées dans la recette bien plus tard et ont détrôné les navets.
La confusion viendrait du vieux français *harigoter ou haligoter qui signifie : déchirer, mettre en lambeaux !
A noter que l’aligot auvergnat trouverait ici la même origine !
Pour le challenge, j’ai réalisé la recette avec des haricots de Soissons :
Pendant la guerre de Cent ans, alors que la peste sévit dans la région, les Soissonnais survivants s’enfuient avec leurs récoltes. Pendant leur fuite, beaucoup perdent des graines.
A leur retour, que ne trouvent ils pas ?
Un champ couvert de fèves ! L’humidité des berges du canal de la Crise favorise ainsi une récolte exceptionnelle et permit de nourrir
toute la population !
Ce haricot devenu célèbre est depuis lors « dit de Soissons »
Et voilà, comment quelques fèves germées ont donné naissance à une légende !
Trop, c’est trop… la tradition familiale résistera t’elle à ces révélations ?
Et bien, oui ! Car j’en appelle aux pouvoirs du frichti, du rata et de la popote réunis pour sauvegarder notre recette, que voici :
Ingrédients pour 4 : Huit morceaux de collier d’agneau ou une épaule désossée et coupée en morceaux – Trois oignons – Deux gousses d’ail – 25 cl de vin blanc – Une cuillère à soupe de concentré de tomate – Un boite de tomates concassées – Un bouquet garni – 250 g de haricots blancs secs – Une cuillère à soupe de farine – Sel & poivre
Pour la cuisson des haricots :
Conformez-vous au mode d’emploi noté sur le paquet. Certains préconisent un temps de trempage, d’autres non.
Puis, mettez les dans une casserole et recouvrez les d’eau froide
Ajoutez un oignon piqué d’un clou de girofle
Poivrez – Personnellement, je ne sale pas en début de cuisson mais à la fin.
Portez à ébullition et laissez cuire sur feu doux pendant 45 mn.
Pendant ce temps, épluchez deux oignons et l’ail – Emincez
Dans une cocotte : faites revenir les morceaux d’agneau dans deux cuillères à soupe de graisse d’oie ou de beurre additionné d’un peu d’huile – Retirez les
Versez les oignons et l’ail et faites suer doucement
Remettre les morceaux d’agneau
Saupoudrez la farine
Mélangez bien
Ajoutez le vin blanc, le concentré de tomate puis les tomates concassées et le bouquet garni
Salez & poivrez
Au terme de la cuisson des haricots, égouttez les et ajoutez les dans la cocotte
Laissez mijoter le tout une bonne heure sur feu doux.
Ce plat peut se réaliser à l’avance et se réchauffer, il n’en est que meilleur.
Et voilà une imposture qui a du bon !
Sources :
Sites : http://wordhistories.com – http://haricotdesoissons.com
* Dictionnaire de l’ancienne langue française et de tous ses dialectes du IXe au XVe siècle – Fréderic Godefroy
*Ménagier de Paris : traité de moral et d’économie domestique composé vers 1393 par un bourgeois parisien et destiné à sa jeune épouse âgée de 15 ans – Gallica-BNF
Photo : Collection personnelle